Un profil possède un axe de référence : la corde;
celle-ci passe par le bord d'attaque et le bord de fuite. L'angle de cette
corde avec le vent relatif est l'angle d'incidence. Lorsqu'une aile est
vrillée, toutes les parties de l'aile n'ont pas la même incidence;
on distingue le vrillage positif et le vrillage négatif ce qui décrit
la position du profil d'extrémité par rapport au profil d'emplanture
(Fig.1).
Le vrillage a deux effets principaux :
-
Il est l'un des trois moyens d'obtenir une répartition de portance
elliptique le long de l'aile.
-
Lorsqu'il est négatif, il est utilisé pour éviter
que le décrochage n'ait lieu à l'extrémité
de l'aile avant d'intervenir à l'emplanture; en effet, une aile
décroche sainement si elle décroche d'abord à l'emplanture,
puis à l'extrémité.
Prenons l'exemple d'une aile équipée d'un Eppler 474
dont la polaire est représentée en (Fig.2) et dont les dimensions
sont données en (Fig.3).
Le décrochage intervient au moment où les trois courbes
Cz (a) atteignent leurs maximums; on voit que
le décrochage ne se produit pas aux mêmes incidences selon
que l'aile évolue à Re = 150 000, à Re = 80 000 ou
à Re = 60 000. On à respectivement les trois incidences de
décrochage : a150 000 = 13,5°;
a80 000 = 8°; a60
000 = 7° (cf Fig.2).
Imaginons que ces ailes ne soient pas vrillées et que le planeur
est en vol stable à une incidence de 2° par exemple; si nous
augmentons l'incidence en réduisant la vitesse (par exemple pour
effectuer une approche), nous arrivons à une incidence de 8°
pour toute l'aile et à 7 m/s; l'extrémité de l'aile
vole alors à Re = 68000x7x0,125 = 60 000 et l'emplanture vole à
Re = 68000x7x0,300 = 143 000. On voit que l'extrémité volant
à 8° pour Re = 60 000 a décroché tandis que l'emplanture
est à 8° encore très loin du décrochage puisque
celui-ci se produit à 13° pour Re = 143 000.
Votre planeur est alors "privé" de ses extrémités
d'ailes qui ne portent plus et il ne vous reste plus qu'à imaginer
sa stabilité en roulis !!...
Le remède est donc de vriller l'aile; dans le cas de cette aile
à extrémités trapézoïdales, on ne vrillera
que les parties non rectangulaires; le vrillage sera négatif et
aura une valeur au moins égale à 13°-7° = 6°;
l'extrémité volera alors avec une incidence de 5° inférieure
à celle de l'emplanture (Fig.4).
Cette fois, lorsqu'on augmente l'incidence, on obtiendra simultanément
7° à l'extrémité et 12° à l'emplanture,
et l'aile décrochera en une seule fois toute entière, les
ailerons restant efficaces jusqu'au bout.
On peut encore rendre le décrochage plus sain en faisant décrocher
l'emplanture avant les extrémités, ceci étant réalisé
par un vrillage encore plus important des extrémités (6°
au lieu de 5° dans l'exemple précédent).
Pour certains profils comme Eppler 392, on voit que, quel que soit le
nombre de Reynolds auquel ce profil travaille, le décrochage intervient
pour la même incidence a = 12°. Donc,
quelles que soient les cordes de l'aile, une aile équipée
d'un tel profil décrochera en même temps à l'emplanture
et à ses extrémités. On peut cependant lui donner
un faible vrillage négatif (1° ou 2°) afin de faire décrocher
l'emplanture avant les extrémités, ainsi, lors d'une augmentation
d'incidence, l'emplanture atteindra la valeur de 12° (décrochage)
avant les extrémités.
Dans le cas d'une aile rectangulaire :
-
Etant donné que toutes les parties de l'aile travaillent au même
nombre de Reynolds, l'aile, si elle n'est pas vrillée, décrochera
globalement.
-
On peut cependant la vrilles pour faire décrocher l'emplanture avant
les extrémités.
Dans le cas d'un planeur de vitesse :
Pour un planeur de vitesse ou pour un planeur classique que l'on fait
accélérer, le vrillage peut avoir pour effet de mal
répartir les portances le long de l'aile, ce qui engendre des efforts
susceptibles de déformer, voire de rompre les ailes :
Prenons l'exemple d'une aile équipée d'un Wortmann FX
60.126 (Fig.5) et dont les dimensions sont définies en (Fig.6) et
qui serait vrillée de 5° (ceci pour l'exemple car ce vrillage
est excessif pour un tel profil)
Admettons que ce planeur vole à une vitesse telle que son aile
à l'emplanture soit à Re = 200 000, son extrémité
volera à Re = 100 000 (ceci correspond à une vitesse de vol
de 53 km/h, ce qui est faible pour un vol de vitesse, mais nous ne disposons
pas de polaires à Re = 400 000 par exemple; le principe reste le
même).
Lors de ce vol rapide, le Cz moyen sera par exemple de 0,3 car l'extrémité
vole à Re = 100 000, à a = -2,5°
et Cz = 0; et l'emplanture vole à Re = 200 000, à a
= -2,5°+5° = 2,5° et Cz = 0,6 (cf Fig.5). Le Cz varie donc
fortement de l'emplanture au saumon, donc la portance varie aussi beaucoup
(elle sera plus forte à l'emplanture), ce phénomène
étant renforcé par le fait que, l'aile étant trapézoïdale,
la surface est plus grande à l'emplanture qu'a l'extrémité
pour un même tronçon d'aile et que la vitesse est élevée;
donc, en conclusion, l'emplanture porte "très fort" alors que les
extrémités ne portent pas, ce qui implique des efforts qui
font se déformer l'aile et lui font prendre la silhouette dite de
"la mouette" :
Dans certains cas, si l'on diminue encore l'incidence, la portance devient
négative en bouts d'aile alors qu'elle est positive à l'emplanture;
ceci conduit à des sollicitations de flexion importantes propres
à briser l'aile.
Conclusion : il ne faut surtout pas vriller exagérément
l'aile d'un planeur devant voler vite à moins de le munir d'une
structure très solide.
De toute façon, le vrillage d'une aile agissant sur la répartition
de portance, il ne faudra pas trop l'exagérer pour essayer de conserver
une répartition de portance elliptique.